Osez la biopsie splénique radiologique : à propos d’un cas inédit de méliodose disséminée - 08/06/24
Résumé |
Introduction |
Les biopsies spléniques radiologiques sont considérées comme des gestes à haut hémorragiques, conduisant parfois à réaliser de splénectomie d’hémostase en urgence. Sa réalisation n’est donc pas de pratique courante et nécessite une expertise radiologique. Nous présentons un cas original de découverte d’une mélioïdose disséminée découverte a l’occasion d’une biopsie splénique radioguidée.
Observation |
Un patient de 62ans, diabétique de type 2, vivant entre la Thaïlande et la France est hospitalisé pour toux et douleurs basithoracique gauche depuis 9 mois. Il a perdu 15kg en 1 an. Il est apyrétique, mais a eu de la fièvre intermittente il y a quelques mois. Il a eu 2 accidents de scooter compliqués de fractures de côtes à gauche il y a 1 an et demi. Il a réalisé en Thaïlande un TDM abdominal retrouvant une lésion splénique de 7,6×6,2×6,8cm, un épanchement pleural gauche avec atélectasie du lobe inférieur gauche semblant communiquer avec la rate au travers du diaphragme. Il n’a pas de syndrome inflammatoire biologique. Les hémocultures sont stériles. Sérologie VIH, VHB, VHC négative. Sérologies parasitaires dont hydatidose et ecchinococose négatives. L’immunophénotypage lymphocytaire ne retrouve pas de clone suspect. L’ETO dédouane une endocardite. L’hypothèse de l’hématome splénique est écartée après relecture scannographique, du fait de la perforation diaphragmatique atypique et l’absence de signe de résorption. La lésion splénique est hétérogène et pseudo tissulaire. La rate est ascensionnée, collée au diaphragme rendant la splénectomie difficile du fait des risques d’adhérence. La lésion pulmonaire ne semble pas accessible par voie endobronchique et nécessite une thoracotomie. Le TEP TDM montre une hyperfixation intense d’une condensation postérobasale gauche, et de deux lésions intraspléniques confluentes. Nous réaliserons une biopsie splénique radiologique (8 carottes faites au pistolet à biopsie de 18G). Il n’y a pas de complication post geste immédiat ou à distance. La culture bactériologique et mycobactériologique sont négatives, et une PCR et culture Burkholderia reviennent positives. Le patient est traité par CEFTAZIDIME 2g×3/j puis par BACTRIM FORTE 3×/j pour une durée totale de 6 mois pour cette infection a Burkholderia pseudomallei splénique et pulmonaire. L’évolution clinique à 6 mois est satisfaisante avec une diminution de la taille des lésions.
Discussion |
La décision de réalisation de la PCR Burkholderia est motivée par la connaissance de l’épidémiologie infectieuse Thailandaise. La mélioidose est une infection a Burkholderia pseudomallei, (BGN aérobies, non sporulés, non fermentants) endémique d’Asie du Sud Est mais émergente dans les pays occidentaux (considérée comme éradiquée depuis 1945). L’infection est associée à une blessure, à l’ingestion ou à l’inhalation de bactéries en aérosol [1 ]. En 2018, le taux de mortalité globale était de 30 à 35 % chez les patients admis dans les hôpitaux en Thaïlande [1 ]. La prévalence était de 36,8 pour 100 000 patients hospitalisés [1 ]. Ce BGN se culture sur les géloses MacConkey, au sang et au chocolat. Les tests PCR auraient une sensibilité de 94 %, une spécificité de 83 % (réaction croisée faussement positive avec plusieurs espèces de Burkholderia) [1 ]. La CEFTAZIDIME et le MEROPENEM sont les antibiotiques utilisés initialement, puis le COTRIMOXAZOLE (TMP-SMX), la DOXYCYCLINE et l’AMOXYCILLINE-ACIDE CLAVULANIQUE pour le relai oral et la prophylaxie post-exposition [2 ]. L’imagerie thoracique retrouve habituellement des lésions nodulaires multiples en cas de dissémination hématogéne ou des lésions abcédées excavées pseudo tuberculeuses. Les autres localisations sont les abcès hépatiques et spléniques. Le diabète est un facteur de risque de mélioïdose avec un risque relatif d’hospitalisation liée à l’infection de 2,2 (IC à 99 %, 2,10 à 2,23) [3 ]. En Thaïlande, le taux de récidive est estimé à 6 % [1 ], conduisant à rallonger les traitements et les prophylaxies secondaires.
Conclusion |
La mélioïdose est une pathologie émergente dans les pays occidentaux du fait des migrations de population. Notre CHU bénéficie de l’expertise de radiologues entraînés dans la réalisation de biopsie splénique. Cette technique a permis un diagnostic de pathologie inédite dans les pays occidentaux sans recours d’une alternative chirurgicale invasive.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Plan
Vol 45 - N° S1
P. A147-A148 - juin 2024 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
L’accès au texte intégral de cet article nécessite un abonnement.
Déjà abonné à cette revue ?